Les inspecteurs de l’environnement de l’Office français de la biodiversité ont procédé à des perquisitions dans le cadre d’une enquête sur la mort d’un Aigle de Bonelli, une espèce rare et protégée. Ils ont saisi des produits insecticides susceptibles d’être à l’origine de celle-ci.
Tout débute en 2021 avec la découverte par le service départemental des Bouches-du-Rhône de l’Office français de la biodiversité (OFB) de la dépouille d’un Aigle de Bonelli sur la commune de Saint-Chamas (13). Le rapace était équipé d’une balise GPS dans le cadre d’un programme de suivi mené par le Conservatoire d’espaces naturels PACA.
Les analyses toxicologiques menées par la suite montrent une intoxication du rapace par une famille d’insecticide dont la substance active est interdite à la vente en France depuis de nombreuses années. Une enquête judiciaire pour destruction d’espèce protégée est alors ouverte par le parquet d’Aix-en-Provence et confiée aux Inspecteurs de l’environnement de l’Office français de la biodiversité. Afin de faciliter le travail d’enquête, les différents acteurs décident de ne pas communiquer autour de cette découverte.
Après plusieurs mois d’investigations, les inspecteurs de l’environnement de l’OFB ciblent un possible mis en cause travaillant sur le site où la dépouille de l’Aigle de Bonelli a été découverte et décident de perquisitionner son domicile et son lieu de travail le mardi 3 mai au petit matin.
Pendant de longues heures, les agents OFB du service départemental des Bouches-du-Rhône, de la brigade mobile d’intervention et de la Direction Interrégionale PACA-Corse accompagnés du vice-procureur en charge de l’enquête et de deux gendarmes de la brigade de Berre-l’Etang vont procéder à une fouille minutieuse des différents locaux et finir par découvrir, dissimulés, un stock d’un produit insecticide, interdit à la vente depuis plus de 10 ans du fait de sa dangerosité, ainsi que du matériel servant à injecter du poison dans des appâts. L’ensemble des produits et objets a été saisi.
L’individu a été auditionné par les inspecteurs de l’environnement qui vont maintenant finaliser leur enquête avant de la transmettre au parquet.
L’Aigle de Bonelli (Aquila fasciata) est un rapace de taille moyenne (environ 70 cm de longueur pour 1,70 m d’envergure) pesant entre 1,5 et 3 kg.
C’est un emblème de la région méditerranéenne est l’une des quatre espèces d’aigles nicheurs de France et le plus menacé d’entre eux, avec seulement 42 couples présents en France en 2021.
Ce déclin rapide de l’espèce s’explique en premier lieu par la persécution (désairage, tir illégal, braconnage) et par des changements de l’occupation du sol : la déprise agricole (et la disparition de l’agriculture et de l’élevage extensifs traditionnels), et le développement rapide des infrastructures et notamment du réseau de distribution d’électricité aérien. Ces modifications ont entraîné la fermeture et la fragmentation des milieux utilisés par l’Aigle de Bonelli avec pour conséquences une moindre disponibilité des ressources trophiques et une augmentation de la mortalité par électrocution/percussion. De plus, la diminution des populations des lapins de garenne a fortement diminué les ressources alimentaires pour ce prédateur.
Un Plan national d’actions pour l’espèce est en cours qui vise à consolider la population française et assurer sa pérennité.
L’Aigle de Bonelli est protégé en France et en Europe (Annexe I de la Directive Oiseaux et Annexe II des Conventions de Bonn et de Berne). En France, elle est inscrite sur la liste rouge des espèces menacées dans la catégorie « en danger ».
Le poison a souvent été utilisé par le passé pour détruire des spécimens de la faune sauvage. C’est avec ce procédé que le Loup a été éradiqué de France en 1930. Aujourd’hui encore, on retrouve chaque année de nombreux animaux ayant succombé à un empoisonnement. L’utilisation de poison est lourde de conséquences car c’est toute la chaîne alimentaire qui peut être empoisonnée, de la proie jusqu’aux espèces nécrophages (vautours) en passant par les divers prédateurs.
La destruction d’espèces protégées par tout moyen est punie de 3 ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende.