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Mayotte : 3 ans de prison pour destruction d’habitats naturels et d’espèces végétales protégées

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Le 7 novembre 2024, le Parquet de Mamoudzou à Mayotte a condamné un individu à trois ans d’emprisonnement ferme et à une amende pour destruction d’habitats naturels et d’espèces végétales protégées sur la commune de Dzoumogné. Cette décision fait suite à une enquête approfondie menée par l’Office français de la biodiversité (OFB) avec le soutien de plusieurs partenaires mobilisés pour la protection des écosystèmes en mangrove (Conservatoire du Littoral, associations, collectivité…)

Destruction d’habitats de Crabier blanc et de Fougères à canards

Une première intervention des forces de l’ordre a mis en évidence la destruction de plus de deux hectares de mangroves à des fins agricoles et pour y établir des habitations sur la commune de Dzoumogné. Le mis en cause a été interpellé suite à un comportement menaçant. Après une longue procédure judiciaire, il a été reconnu coupable et condamné à un an de prison.

À sa sortie, cette personne a réitéré ses destructions à quelques centaines de mètres du premier site, impactant cette fois plusieurs milliers de mètres carrés supplémentaires d’arrière-mangrove et de mangrove. Les services de l’OFB ont mené une enquête minutieuse permettant de réunir les éléments nécessaires pour assurer son interpellation et cette nouvelle condamnation. Saluée par les autorités locales et les associations de protection de la nature, cette décision historique envoie un message fort aux auteurs d'infractions environnementales et réaffirme la détermination des acteurs de l'État à préserver la biodiversité unique de Mayotte. Le Conservatoire du littoral et les associations locales travaillent main dans la main pour restaurer ces écosystèmes endommagés et sensibiliser la population aux conséquences de ces dégradations. Le site impacté fera l’objet d’une opération de renaturation, qui renforcera la résilience de cette zone et préservera les services vitaux rendus par la nature.

L’affaire met en lumière la destruction des habitats essentiels du Crabier blanc (Ardeola idae), un oiseau migrateur en danger d'extinction, et de la Fougère à canards (Acrosticum aureum), une plante ayant un rôle crucial dans la préservation du littoral et la prévention de l’érosion côtière. Le Crabier blanc dépend des zones humides de l’île pour sa reproduction et son alimentation, et toute atteinte à ces espaces fragilise davantage sa survie. La destruction de ces espèces et de leurs habitats dépasse le cadre écologique et affecte également la vie des population riveraines.
La perte des mangroves et des zones humides augmente en effet les risques d’inondations, d’érosion et de salinisation des eaux. Les villages côtiers, en sont les premières victimes. Protéger les habitats naturels, c'est aussi agir pour la sécurité et la résilience des Mahorais face aux aléas climatiques.

 

Le crabier blanc

La population de crabier blanc (Ardeola idae) est en déclin. Elle est estimée entre 2 000 et 4 000 individus, l’espèce est classée en danger d’extinction au niveau mondial sur la liste rouge de l’UICN. Environ 200 couples ont choisi Mayotte comme site de reproduction, et plus particulièrement les mangroves et lagunes. Cela représente 20% de la population mondiale. Mayotte a donc une responsabilité dans la préservation de cette espèce protégée. Sa principale menace est constituée par la dégradation et la destruction de son habitat par la pollution de l’eau, l’assèchement des zones humides, le recul des mangroves, les incendies, mais aussi la transformation de marais en site de culture. Les œufs et les poussins subissent une prédation naturelle d’autres espèces qui s’en nourrissent, mais aussi le braconnage des hommes. Le dérangement lié aux activités humaines constitue aussi une source de stress pour cet animal farouche.

La fougère à canard

La Fougère à canard (Acrostichum aureum), également connue sous le nom de fougère dorée ou Golden Leather Fern, est une plante emblématique des mangroves. Présente dans les arrières-mangroves de Mayotte, mais aussi en Nouvelle-Calédonie, aux Antilles, en Guyane et en Polynésie française. Elle peut atteindre jusqu’à 3 mètres de hauteur. La Fougère à canard est une espèce associée aux arrières mangroves, évoluant dans des zones moins exposées à l’eau salée que les palétuviers composant la mangrove. Elle constitue une sentinelle écologique dans ces habitats, classés en danger critique par l’UICN à Mayotte.  Classée vulnérable sur la Liste rouge et protégée à Mayotte, la Fougère à canard est une espèce majeure pour la conservation des écosystèmes. Ses longues frondes et ses tiges rigides contribuent à stabiliser les sols et à limiter l’érosion côtière.