Développer les zones de protection forte

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France entière

En 2022, la France s’est fixée un objectif de protection renforcée de la biodiversité sur 10 % du territoire national. La reconnaissance de ces zones de protection forte (ZPF) est un enjeu majeur pour les années à venir en France, puisqu’elles ne couvrent aujourd’hui que 5,2% du territoire terrestre et marin français dans l'Hexagone et dans les Outre-mer.

Qu’est-ce qu’une zone de protection forte ?

Le décret n° 2022-527 du 12 avril 2022 définit la notion de protection forte et ses modalités de mise en œuvre : 

    • « 

      Est reconnue comme zone de protection forte une zone géographique dans laquelle les pressions engendrées par les activités humaines susceptibles de compromettre la conservation des enjeux écologiques sont absentes, évitées, supprimées ou fortement limitées, et ce de manière pérenne, grâce à la mise en œuvre d'une protection foncière ou d'une réglementation adaptée, associée à un contrôle effectif des activités concernées

       »

      Décret n° 2022-527 du 12 avril 2022 Article 1

    Il ne s’agit pas de créer un nouvel outil mais de labelliser « zone de protection forte » une zone ou une partie de zone protégée déjà existante, dont le niveau de gestion permet d’assurer un « haut degré de conservation de la nature » grâce à :

    • La réglementation de certains usages et activités (zone de tranquillité, réglementation de prélèvements d’espèces, libre évolution d’écosystèmes, etc.) ;
    • Une protection foncière ;
    • La mise en place de mesures de gestion ou de restauration (actions de dépollution, ingénierie écologique…) ;
    • La mise en place de dispositifs de surveillance et de contrôles adaptés.

    Les zones de protection forte contribuent grandement à conserver ou restaurer l’intégrité écologique et la résilience des milieux naturels dans un contexte de changement global.

    Pourquoi des zones de protection forte ?

    Les objectifs fixés en matière de protection forte visent à s’assurer que, sur au moins 10% du territoire français, les pressions exercées sur les milieux riches en biodiversité et/ou qui sont menacés soient supprimées ou suffisamment réduites pour leur permettre le retour à un bon fonctionnement. Il s’agit ainsi de garantir la conservation et la restauration d’écosystèmes jouant un rôle fondamental dans la protection de la biodiversité, l’adaptation au changement climatique et la fourniture de services écosystémiques dont dépendent les sociétés humaines.

    En milieu marin par exemple, des cantonnements de pêche peuvent être mis en place pour une meilleure gestion des ressources de pêche. Un cantonnement de pêche dans le Parc naturel régional de Camargue a permis, en huit ans, de doubler la biomasse et de tripler le développement d’un herbier marin, qui aide à la protection du littoral en atténuant la houle, les tempêtes et l’érosion.

    En milieu terrestre, pour protéger les zones de nidification des oiseaux sensibles à la fréquentation humaine, les sentiers touristiques peuvent être déviés. Ces ajustements permettent de contribuer à la reconnaissance des zones de protection forte, limitant ainsi les perturbations et préservant ces habitats essentiels.

    Un objectif de 10% de couverture nationale de protection forte pour 2030

    La stratégie nationale des aires protégées, (SNAP), publiée en 2021 ambitionne de protéger 30 % du territoire national et des eaux maritimes d'ici 2030, dont 10 % en protection renforcée. Cet objectif rejoint, à une échelle plus large, celui de l’accord de Kunming-Montréal. Cette stratégie concerne les territoires terrestres et marins dans l’Hexagone et en Outre-mer. De par ses missions sur les aires protégées, l’OFB est un acteur majeur de sa mise en œuvre et accompagne ainsi le déploiement de zones de protection forte.

    En mer, la Stratégie nationale biodiversité adoptée en 2023, fixe des objectifs complémentaires en matière de protection forte dans les eaux hexagonales :

    • 5% des façades hexagonales d’ici 2030, avec des objectifs intermédiaires par façade à atteindre d’ici 2027 :
      • 1% de la façade Manche Est Mer du Nord,
      • 3% de la façade Nord Atlantique – Manche ouest,
      • 3% de la façade Sud-Atlantique,
      • 5% de la façade Méditerranée.

    Quels sont les critères de choix pour une zone de protection forte ?

    Il existe deux manières d’être labellisé « zone de protection forte » : la zone est dans un périmètre reconnu d’office « ZPF » grâce à son statut initial, ou elle bénéficie d’une étude au cas par cas.

    Les zones propices pour le développement des zones de protection forte sont d’abord identifiées au regard de la localisation des milieux qui nécessitent une conservation prioritaire.

    Une analyse est ensuite réalisée pour évaluer si le niveau de protection actuel est suffisant pour permettre la labellisation en protection forte ou s’il doit être renforcé (caractère pérenne des mesures…). Le gestionnaire ou propriétaire de la zone propose le dossier à un service de l’État déconcentré qui instruit le dossier et le transmet au ministère pour validation.

    Zones ciblées prioritaires

    Les zones de protection forte se concentrent en priorité sur la protection des milieux riches en biodiversité ou particulièrement vulnérables face aux changements à venir. Parmi les écosystèmes bénéficiant d’une attention particulière figurent les zones humides, le littoral (notamment les mangroves et les savanes du littoral guyanais), les habitats marins sensibles (comme le maërl, les récifs coralliens, les herbiers), les milieux insulaires, les zones de montagne et les espaces forestiers tels que les forêts subnaturelles.

    Zones éligibles à la protection forte

    Le décret n°2022-527 liste les périmètres pouvant relever d’une zone de protection forte :

    • À terre, certains types d’aires protégées sont reconnus d’office comme des ZPF. Il s’agit des cœurs de parcs nationaux, des réserves naturelles, des réserves biologiques, des arrêtés de protection (de biotope, de géotope et d’habitat naturel).

    D’autres types d’aires protégées ou de périmètres doivent en revanche faire l’objet d’une analyse au cas par cas. Il s’agit par exemple des sites classés, des bandes littorales ou des espaces naturels sensibles.

    • En mer, les cœurs de parcs nationaux, les zones de protection renforcée et les zones de protection intégrale des réserves naturelles, ainsi que les zones couvertes par un arrêté de protection, créées après la publication du décret sont reconnus d’office comme des ZPF. Ceux créés antérieurement à l’entrée en vigueur du décret ont eu deux ans pour remplir les critères d’une ZPF.

    Plusieurs espaces maritimes peuvent également être reconnus comme ZPF après une analyse au cas par cas, prioritairement situés dans une aire marine protégée.

    Le rôle de l’OFB dans les zones de protection forte

    L’Office français de la biodiversité travaille à renforcer le niveau de protection au sein des aires protégées qu’il gère de façon à contribuer activement à la conservation de la biodiversité. Nous sommes en effet gestionnaires d’aires protégées à terre et en mer : parcs naturels marins, sites Natura 2000, réserves et sanctuaire de mammifères marins. Nous apportons également un appui technique aux autres catégories d’aires protégées.

    Prospection et mise en place de zones de protection forte dans nos aires protégées

    Les moyens humains et financiers mis en œuvre pour la gestion de ces aires protégées permettent aujourd’hui d’avoir une connaissance fine des enjeux à préserver et des pressions qui s’exercent sur ces territoires. Il s’agit d’un atout pour proposer la mise en place de zones de protection forte pertinentes.

    Ainsi, des analyses sont menées dans nos aires protégées. Dans le Parc naturel marin de l’estuaire de la gironde et de la mer des Pertuis par exemple, une démarche de protection forte du Parc a été lancée en 2022. Un état des lieux des secteurs correspondants en l’état aux critères de protection forte du décret a été réalisé grâce au programme européen Feder. De plus, l’identification et la proposition de nouveaux secteurs qui, moyennant des évolutions réglementaires, répondront aux critères de protection forte ont également été effectuées. 

    Appui aux gestionnaires et services de l’État

    L’OFB a également un rôle d’appui aux gestionnaires et aux services de l’État pour le déploiement de ces zones de protection forte au sein des aires protégées dont il n’est pas gestionnaire. Nous rendons ainsi des avis aux services déconcentrés de l’Etat, formulons des recommandations et accompagnons les gestionnaires dans l’élaboration de leurs propositions.

    Dans le cadre du programme européen LIFE Marha par exemple, plusieurs travaux mobilisant les sciences humaines et sociales ont été financés par l’établissement pour accompagner les réflexions de mise en œuvre de zone de protection forte sur plusieurs secteurs en Méditerranée. Cela concerne la réserve marine de Brescou (Agde), au sein du Parc naturel régional de Camargue ou encore le parc national de Port-Cros pour accompagner la réflexion.

    Aussi, dans le cadre du LIFE "Espèces marines mobiles" porté par l'OFB, un travail d'inventaire des usages et pressions sur une liste des secteurs d'intérêt a été initié pour y envisager la mise en place de protections fortes. Ces études permettront d'accompagner la réflexion des gestionnaires et des services de l'Etat sur les enjeux socio-économiques des secteurs et les pressions exercées.

    La liste des ZPF en France mise à jour par l’UMS Patrinat

    Créée en décembre 2017, l’Unité d’appui et de recherche « Patrimoine naturel » (UAR PatriNat) assure des missions d’expertise et de gestion des connaissances pour le compte de ses quatre tutelles, le Muséum national d’histoire naturelle, l’Office français de la biodiversité, le Centre national de la recherche scientifique et l’Institut de recherche pour le développement. Elle diffuse auprès du grand public l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN), portail national d’accès aux données sur les espèces et les milieux. Gestionnaire de la base de données des aires protégées, c’est sur ce portail que l’UMS Patrinat met en ligne la liste des zones de protection forte reconnues par le ministère en charge de l’écologie.