Pour la première fois, la Liste rouge des espèces menacées en France s’est portée sur les champignons, explorant la situation des bolets, des lactaires et des tricholomes. Parmi les 319 espèces recensées dans ces trois groupes sur le territoire métropolitain, 12 espèces sont menacées comme le Bolet rubis, le Lactaire des saules réticulés et le Tricholome équestre des chênes, tandis que 16 autres apparaissent quasi menacées.
Ces résultats sont le fruit d’analyses coordonnées par le Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’Office français de la biodiversité (OFB) et le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN), avec les connaissances et l’expertise de nombreux mycologues et en collaboration avec l’Association pour le développement d'outils naturalistes et informatiques pour la Fonge (AdoniF).
Appartenant à la catégorie des champignons à chapeau, les bolets, les lactaires et les tricholomes s’observent principalement en forêt et parfois en milieu ouvert, des plaines côtières jusqu’en haute montagne. Ils sont composés d’une partie souterraine filamenteuse, le mycélium, et d’une partie extérieure portant le chapeau, qui contient les spores leur permettant de se reproduire. Nombre d’entre eux vivent en symbiose avec des arbres, qui leur apportent des sucres issus de la photosynthèse et reçoivent en retour de l’eau et des éléments nutritifs.
Pour identifier les pressions et orienter les priorités de conservation, le risque de disparition de chacun d’eux a été évalué. Parmi les espèces menacées, le Lactaire des saules réticulés apparaît "En danger critique", le Bolet de plomb, le Bolet rubis et le Lactaire jaunissant boréal sont classés "En danger", le Bolet rose pastel, le Lactaire mamelonné des tourbières et le Tricholome équestre des chênes se trouvent classés "Vulnérables".
Les principales menaces pour ces espèces sont la destruction et la dégradation de leurs habitats naturels, incluant la sylviculture intensive avec l’abattage des vieux arbres et les coupes rases, la conversion de certaines forêts en terres agricoles, ainsi que l’urbanisation et les aménagements touristiques en montagne. Le changement climatique représente une autre grande menace, asséchant en particulier l’habitat des espèces de milieux frais et humides ou augmentant la fréquence des tempêtes, des sècheresses et des incendies pour les espèces forestières. D’autres pressions comme le drainage et le remblaiement des zones humides, l'épandage d'engrais et de fongicides ou le pâturage intensif affectent aussi ces espèces.
Sur le plan des connaissances, l’état des lieux révèle un manque d’informations pour 25 % des champignons évalués, qui se voient classés en catégorie "Données insuffisantes". C’est notamment le cas du Lactaire chiffonné et du Bolet de Corse. Cette situation encourage le développement de prospections de terrain et l’amélioration des informations disponibles, car si seuls 3,8 % des champignons apparaissent aujourd’hui menacés, ce pourcentage devrait augmenter lorsque les connaissances auront progressé pour préciser leur état de conservation.
Malgré les menaces qui s’exercent sur leurs habitats naturels, aucune espèce de champignons ne fait à ce jour l’objet d’un programme de conservation dédié ou de mesures spécifiques de protection. Les résultats de la Liste rouge contribueront à orienter les stratégies d’acquisition de connaissance et les priorités d’action. L’état des lieux souligne en particulier l’importance de la lutte contre le changement climatique et de la préservation des milieux naturels, notamment forestiers, pour sauvegarder la diversité des espèces et le patrimoine mycologique de notre territoire.
Qu’est-ce que la Liste rouge des espèces menacées et à quoi sert-elle ?
La Liste rouge des espèces menacées en France est un état des lieux détaillé du niveau de menace pesant sur les espèces de la faune, de la flore et de la fonge à l’échelle du territoire national. Établi selon les critères internationaux de l’UICN, cet inventaire de référence permet de classer les espèces selon leur risque de disparition, de définir les priorités d’action et d’appuyer les politiques et les stratégies de conservation de la nature. Ses résultats sont diffusés dans le cadre de l’Inventaire national du patrimoine naturel (INPN).
Le Comité français de l’UICN, l’OFB et le MNHN sont les garants de la méthodologie scientifique et de la démarche collégiale utilisées. Réalisée avec de nombreuses organisations partenaires et un vaste réseau d’experts, la Liste rouge nationale constitue un indicateur privilégié pour évaluer et suivre l’état de la biodiversité en métropole et en outre-mer.
Publication et résultats détaillés disponibles sur :