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Mortalité anormale d'une espèce d'oiseau protégée sur une plage de Camargue

Police de l'environnement
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Le 4 mai dernier, alors que la France était toujours en confinement, le service départemental des Bouches-du-Rhône de l’Office français de la biodiversité a réalisé, dans le cadre du réseau SAGIR, une intervention concernant une importante mortalité d’une espèce d’oiseau rare et protégée : le Puffin Yelkouan.

Le 4 mai 2020, les gardes du Littoral officiant au sein du parc naturel régional de Camargue reçoivent une information les alertant de la présence de cadavres d’oiseaux le long de la plage Napoléon sur la commune de Port Saint-Louis (13). Rendus sur place, ils découvrent 56 oiseaux morts, récemment déposés par la mer, et répartis sur une zone de 800 m de long.

Il s’agit de Puffins yelkouan, une espèce protégée d’oiseau pélagique qui niche sur les îles Méditerranéennes.

Une intervention de l’OFB dans le cadre du réseau SAGIR

Grâce à la bonne coordination des différents services, l’information a vite circulé et face à cette mortalité anormale, il a été décidé d’activer le réseau SAGIR au titre de la surveillance épidémiologique.

Mortalité de Puffins en Camargue. Crédit photo : Sylvain Ceyte / Parc naturel régional de Camargue

Dans ce cadre, un inspecteur de l’environnement du service départemental de l’OFB des Bouches-du-Rhône s’est rendu au siège du parc naturel régional de Camargue le 5 mai. Il a procédé à un premier examen visuel des puffins. 6 oiseaux ont ensuite été amenés au laboratoire départemental d’analyses de Marseille afin de déterminer les causes de cette mortalité. Une autopsie a été pratiquée et différents examens complémentaires sont en cours.

Le réseau SAGIR

Le réseau SAGIR est un réseau de surveillance épidémiologique des oiseaux et des mammifères sauvages terrestres en France dont l’objectif est de détecter l’apparition de maladies nouvelles pour la faune sauvage ou d’agents infectieux transmissibles à l’homme et/ou partagés par la faune sauvage et les animaux domestiques. Le réseau regroupe l’OFB, les laboratoires vétérinaires départementaux et les fédérations départementales des chasseurs. Plus d’informations : http://www.oncfs.gouv.fr/Reseau-SAGIR-ru105

Des hypothèses à confirmer…

Les causes de cette mortalité peuvent être multiples : virus, pollution, activités de pêche…
L’agrégation des oiseaux échoués sur la plage, leur état de fraîcheur homogène et les premiers relevés lésionnels des autopsies sont compatibles avec une cause traumatique et une dispersion de cadavres à partir d’un point côtier. L’hypothèse d’une capture accessoire par des filets de pêche a été émise mais nécessite d’être vérifiée. Les analyses et investigations complémentaires permettront d’éclairer la ou les causes de ces échouages. Une mortalité importante de puffins a été constatée récemment en Tunisie sans qu’il ne soit fait de lien pour le moment entre ces deux événements.

À noter qu’un partenariat entre l’OFB, le Parc national de Port-Cros et la Ligue de protection des oiseaux a été acté pour conduire une étude des captures accidentelles d’oiseaux marins avec les pêcheurs de Port-Cros sur une durée de 3 ans. Cette étude pilote avec les pêcheurs locaux permettra de préciser les pratiques, identifier les éventuels besoins, tester des solutions et partager les bonnes pratiques avec d’autres aires marines protégées de Méditerranée.

La Camargue, zone vitale pour l’avifaune

La Camargue est une zone humide d’importance exceptionnelle reconnue à l’échelle internationale. Elle est située dans l’axe de migration des oiseaux du nord de l’Europe vers l’Afrique où transitent et hivernent des dizaines de milliers d’oiseaux dont de nombreuses espèces à forte valeur patrimoniale. Il est à noter qu’un projet de parc éolien offshore flottant situé au large de la Camargue est actuellement à l’étude.

À la découverte du Puffin Yelkouan

Puffin yelkouan, une espèce endémique de Méditerranée. Crédit photo : Xavier Rufray / Biotope

Le Puffin Yelkouan (Puffinus yelkouan) est une espèce endémique du bassin méditerranéen, capable de déplacements sur de grandes distances. D’une envergure variant de 70 à 90 cm, il est capable de plonger jusqu’à 40 mètres de profondeur, mais aussi de pêcher en plein vol, attrapant les proies au passage en plongeant le bec dans l’eau. Il se nourrit principalement de poissons et de petits crustacés pélagiques.

Il ne revient à terre que pour la reproduction et la nidification sur des îles ou îlots rocheux (janvier-juillet). C’est alors un oiseau nocturne qui se regroupe en colonie, repérable à son cri rauque et puissant. Dans une falaise ou un escarpement, les adultes choisissent un terrier, une fissure entre deux rochers où la femelle pondra un œuf unique. Les sites de reproduction s’étendent essentiellement de l’Ouest de la Provence à l’est de la Turquie. En France, il affectionne presque exclusivement les espaces protégés de Méditerranée : les îles d’Hyères (Port-Cros, Porquerolles, île du Levant) et l’archipel du Frioul, près de Marseille.

La population mondiale compterait seulement 20 000 couples. Espèce strictement protégée en France (Arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés), inscrite à la Directive Oiseaux (annexe I) et à la Convention de Berne (annexe II), le Puffin Yelkouan est une espèce classée vulnérable sur la liste rouge de l’Union internationale de la conservation de la nature (UICN) et mal connue.
La population connaît un déclin marqué. Les principales causes de ce déclin sont attribuées aux prédateurs introduits (le rat noir ou le chat hare) et aux captures accidentelles par les engins de pêche. Le Parc national de Port-cros, la Ligue de protection des oiseaux et le CNRS ont d’ailleurs développé des programmes pour limiter les prédations sur les œufs et les nids dans les îles de Hyères et de l'archipel de Frioul, près de Marseille. Le Puffin Yelkouan compte parmi les 28 espèces de la famille. Il a longtemps été assimilé à tort au Puffin des Baléares. L’OFB rédige actuellement un plan national d’action en faveur du Puffin des Baléares, espèce en danger critique d’extinction, qui devrait être validé par le Ministère de la transition écologique et solidaire d’ici la fin d’année.

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