L’amnésie environnementale recouvre l’idée qu’au fil des générations, nous "oublions" un contexte de vie dans lequel la nature était davantage présente (Kahn, 2002). Chaque individu construirait sa relation au monde à partir des expériences de son enfance. Les générations se succèdent et construisent leurs représentations du bon état de la nature sur des référentiels différents. Comment s'y appuyer ?
Le poids de la diminution des expériences de nature dans nos sociétés occidentales (Pyle, 1978)
- Plusieurs études réalisées en Europe, aux États-Unis et au Japon montrent que, en moyenne, la fréquentation des espaces de nature par les enfants diminue drastiquement d'une génération à l'autre (Soga et Gaston 2016).
- Or, le contact avec la nature encourage les émotions, attitudes et comportements positifs envers l’environnement (Fleury et Prévot, 2020).
Pointe des Capucins dans le Parc naturel marin d'Iroise (Florent Goulo, OFB)
- Par ailleurs, la fragmentation et la rareté des expériences peuvent, dans certains cas, accroître notre méconnaissance des mécanismes adaptatifs de la nature, diminuer notre sentiment d’appartenance à la nature et amplifier l’amnésie environnementale et ses effets.
Illustrations - exemples
Une étude montre que chaque génération de pêcheurs considère la quantité de poissons qu'il rencontre au début de sa carrière comme son point de référence et que, aux États-Unis, les pêcheurs plus âgés dénombrent plus de lieux de pêche dégradés que les jeunes (Pauly, 1995).
En France, l’enquête "les Français et la nature" a montré que les rapports à la nature diffèrent entre générations et qu’ils sont liés au cadre de vie des individus durant leur enfance (voir détail dans l'accordéon ci-dessous).
Transformer des freins en moteurs ?
L’amnésie environnementale et la diminution des expériences de nature peuvent ainsi expliquer en partie notre difficulté à nous mobiliser face aux enjeux de biodiversité (Papworth et al., 2009) et à construire des récits alternatifs au récit dominant, freinant ainsi l’activation des changements transformateurs nécessaires pour inverser la tendance à l’érosion de la biodiversité.
Elle peut cependant constituer le moteur de l’émergence d’un désir et de démarches individuelles et collectives de reconnexion et de réappropriation (Fleury et Prévot, 2017), démarches souvent fragiles et localisées, dans des conditions qui restent à éclairer et partager.
Partager les expériences
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Quelles solutions opérationnelles pour lutter contre l’amnésie environnementale et ses effets ? 1 - Lier cadre de vie, santé humaine et état de la biodiversité
Favoriser la place de la nature dans le cadre de vie, dans les établissements de santé et parcours de soin, participe indirectement à lutter contre les effets de l’amnésie environnementale. Éléments de réflexion, principes et expériences sont présentés.
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Quelles solutions opérationnelles pour lutter contre l’amnésie environnementale et ses effets ? 2 - Encourager l’expérience
Renouer avec la nature : depuis l’immersion à travers les expériences sensibles et sensorielles dans la nature et la pratique de la classe dehors ; jusqu’aux expériences sans contact physique, par médias interposés par exemple.
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Quelles solutions opérationnelles pour lutter contre l’amnésie environnementale et ses effets ? 3 - Partager la mémoire associée à un paysage, à un état de la biodiversité, à nos relations au vivant
Les sociétés humaines et dynamiques écologiques n’ont cessé de transformer les paysages et relations au vivant. Différentes initiatives de partage de mémoire sont présentées : échanges intergénérationnels, registre historique, et collection d'anecdotes.