Le règlement européen sur la restauration de la nature : quelle application en France ?

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France entière

Le Règlement européen sur la restauration de la nature, adopté en 2024, impose de restaurer 90 % des milieux dégradés terrestres, aquatiques et marins, d’intérêt européen d’ici 2050, ainsi que la biodiversité dite « plus ordinaire ». Le plan national d’actions français est à coconstruire entre citoyens et acteurs, une consultation publique est ouverte.

Seuls 20 % des habitats terrestres et 6 % des milieux aquatiques d’intérêt européen sont en bon état de conservation en France. Restaurer la nature devient donc une priorité vitale pour préserver les services écologiques essentiels à la santé, à l’agriculture ou encore au climat.
Le règlement européen sur la restauration de la nature s’inscrit dans cette urgence pour redonner une bonne santé aux écosystèmes dégradés, au bénéfice de l’environnement et des citoyens.  Il lance également une dynamique inédite en fixant un cadre commun aux Etats européens.
 

La restauration écologique des milieux naturels : deux modalités complémentaires

Le but visé dans la restauration est de rétablir un fonctionnement écologique satisfaisant des écosystèmes.

  1. Dans un premier temps l’objectif est de réduire ou supprimer les pressions exercées sur les écosystèmes : c’est la restauration naturelle.
  2. Lorsque ces conditions ne suffisent pas, des interventions techniques ciblées peuvent être mises en œuvre, qualifiées de continuum restauratif.

Schéma des différents stades du continuum restauratif de la nature (figure 5, SER - Society for ecological restoration, 2019)

Figure 5. Le Continuum restaurateur comprend une gamme d’activités et d’interventions qui peuvent améliorer les conditions environnementales et inverser la dégradation écosystémique et la fragmentation des paysages. Le continuum met en évidence les interconnexions entre ces différentes activités et reconnaît que les caractéristiques spécifiques de la localité envisagée pour les actions restauratrices dictent les travaux les mieux adaptés aux différentes unités de paysage. À mesure que l’on se déplace de gauche à droite sur le continuum, les résultats sur la santé écologique et sur la biodiversité, ainsi que la qualité et la quantité des services écosystémiques augmentent. Notez que la restauration écologique peut se produire dans les paysages urbains, suburbains, agricoles et industriels.Gann GD, McDonald T, Walder B, Aronson J, Nelson CR, Jonson J, Hallett JG, Eisenberg C, Guariguata MR, Liu J, Hua F, Echeverría C, Gonzales E, Shaw N, Decleer K, Dixon KW (2019). Principes et normes internationaux pour la pratique de la restauration écologique. 2e édition (français). Restoration Ecology S1-S46. RÉDUCTION DES IMPACTS SOCIAUXAMÉLIORATION DE LA GESTION DES ÉCOSYSTÈMESRÉPARATION DES FONCTIONS ÉCOSYSTÉMIQUESINITIATION DU RÉTABLISSEMENT INDIGÈNERÉTABLISSEMENT PARTIEL DES ÉCOSYSTÈMES INDIGÈNESINDIGÈNES RÉTABLISSEMENT COMPLET DES ÉCOSYSTÈMES INDIGÈNESREDUCTION DES IMPACTSRÉMEDIATIONRÉHABILITATIONRESTAURATION ÉCOLOGIQUE

Le règlement, une approche intégrée qui s’appuie sur des objectifs et indicateurs communs

Le Règlement européen sur la restauration de la nature a été adopté en 2024 par les États membres et le Parlement de l’Union européenne.
Il impose de restaurer :

  • un certain nombre de milieux naturels d’intérêt européen dégradés, fixant des objectifs,
  • la biodiversité dite "plus ordinaire" : celle des zones humides, tourbières, prairies, forêts, haies, rivières, cours d’eau ou encore des espaces urbains verts. Il cible notamment les écosystèmes et actions ayant le plus de potentiel de captation carbone et de soutien à la biodiversité, mais aussi de contribution à la santé et à l’alimentation. Il s’agit de faire progresser des indicateurs : nombre d’insectes pollinisateurs, cours d’eau « en libre écoulement », mètres carrés d’espaces verts en ville, nombre d’oiseaux communs liés aux milieux agricoles ou forestiers…

Des objectifs progressifs et imposés pour la restauration des milieux naturels d’intérêt européen dégradés

  • 30 % d’ici 2030
  • 60 % d’ici 2040
  • 90 % d’ici 2050

Ce règlement introduit pour la première fois des obligations juridiques de résultats en matière de restauration écologique, assorties d’indicateurs de suivi et de rapports réguliers.

Il développe également une vision intégrée, telle que préconisée par l’IPBES, puisque la restauration doit bénéficier à la biodiversité, mais également à l’alimentation et la lutte contre le changement climatique (articles 1 et 2 du règlement).
Le règlement se donne 25 ans, d’ici 2050, pour restaurer tous les écosystèmes qui le nécessitent, qu’ils soient marins, terrestres ou aquatiques, et 20% d’entre eux d’ici 2030.

Des obligations structurantes sur des habitats et espèces précises

Le Règlement est structuré en deux grands piliers.

  1. Renforcer les directives préexistantes selon une logique surfacique : directives Habitats faune flore et Oiseaux, directive cadre sur l’eau, directive cadre Stratégie pour le milieu marin. L’action est évaluée en termes de mise en œuvre, des quotas de surface et donc de moyens engagés.
  2. Couvrir tous les écosystèmes, selon une logique par indicateurs (ci-desssous). L’action est évaluée en termes de résultats attendus : des indicateurs en progrès et donc une amélioration de l’état des habitats constatée.

Le Règlement se décline ensuite en objectifs de moyens ou de résultats, par grands types d’écosystèmes.

Schéma des grands type d'habitats naturels cibles de restauration surfaciques ou par indicateurs (Patrinat, OFB)

Cibles :  les objectifs spécifiques

Le plan national « Agir pour restaurer la nature » : coconstruction en cours

La démarche a pour particularité d’associer au sein du plan des mesures nouvelles à des existantes pour répondre aux objectifs. Il donne ainsi une force réglementaire à toutes les actions qu’il contient, améliorant leur portée par une inscription en droit dit « dur ».

Un cadre général européen et des choix nationaux

Comme tous les États membres, la France doit décliner ce règlement européen en plan national d’actions. 

Ce plan, nommé « Agir pour restaurer la nature » fixera des objectifs concrets et des mesures pour les atteindre.  Les mesures y seront réparties par grands types d’écosystèmes :

  • milieux aquatiques continentaux :  milieux humides, tourbières, cours d’eau, plans d’eau,
  • forêts,
  • espaces agricoles,
  • milieux urbains,
  • milieux marins et littoraux.

Travaux de remise en eau d’anciens méandres de l'Echandon afin de restaurer ses fonctions hydrobiologiques (Michel Bramard, 2018, OFB)

Son format est imposé : il doit détailler les grandes mesures, c’est-à-dire de « niveau 1 » et de portée nationale, qui permettent la restauration des milieux d’intérêt communautaire, des habitats d’espèces, ou d’infléchir les indicateurs à la hausse.
Les mesures doivent y être évaluées financièrement et un financement indiqué, de nature public ou privé, au niveau européen, national ou local. Les subventions néfastes doivent aussi être identifiées.

Pour la part non obligatoire, une typologie détaille des mesures de « niveau 2 », précisant les types d’opérations possibles, de la levée des pressions à la restauration assistée et reconstructive, en passant par des actions de suivi, formation ou encore de sensibilisation.

Élaboration du plan national français : participez !

La définition et la mise en œuvre de ce Plan sont élaborés en coconstruction avec les citoyens et les parties prenantes, des porteurs de projets de restauration aux filières impactées.
De fin mai à fin août 2025, une large consultation publique est donc ouverte et proposée à l’ensemble des citoyens et parties prenantes. Elle est coordonnée par le ministère de la Transition écologique, sous la garantie de la Commission nationale du débat public (CNDP). Sur cette base de travaux au sein des instances nationales, le plan sera élaboré, soumis à évaluation environnementale pour juger de sa suffisance et de nouveau soumis à consultation publique au printemps 2026.

Quels sont les objectifs et mesures prioritaires selon vous ? 

Apportez votre contribution à l’élaboration de ce plan national d’actions, plusieurs moyens sont disponibles :

Restaurer la nature : des connaissances et éléments techniques dédiés

Différents projets et études sont menés sur les sujets liés à la restauration des écosystèmes et de leurs fonctionnalités écologiques. Leurs objectifs sont de :

  • améliorer la connaissance : comprendre, suivre et évaluer,
  • pour accompagner et outiller les acteurs : recommandations techniques et méthodologiques, partages d’expériences...

De nombreuses informations scientifiques et ressources techniques sont disponibles pour identifier les solutions et actions spécifiques selon les contextes, enjeux et milieux concernés. En voici une sélection parmi celles présentes sur ce site dans les différentes rubriques.

Un centre de ressources dédié au génie écologique

Les centres de ressources (CDR) ont pour vocation de développer les compétences et d'accompagner techniquement les acteurs pour la mise en œuvre des politiques publiques, selon un mode de travail multi-partenarial et collaboratif. Chacun est coordonné par l’Office français de la biodiversité (OFB) et des partenaires parties prenantes de la thématique.
Ainsi le CDR Génie écologique a pour objectifs de :

  • mutualiser les bonnes pratiques de restauration, création et gestion des milieux naturels (études et travaux),
  • centraliser les ressources (retours d'expériences, outils, méthodes, etc.),
  • appuyer le travail des professionnels concernés (bureaux d'études, entreprises, gestionnaires d'espaces naturels) par la formation,
  • partager les expériences entre les secteurs publics et privés, en lien avec les dynamiques régionales en cours.

Les autres centres de ressources regorgent également d’idées, de dispositifs d’accompagnement ou retours d’expériences. Ils sont source d’inspiration et d’aide à la mise en place d’actions.

Des ressources thématiques ou par milieux

Retrouvez ci-dessous une sélection de ressources méthodologiques, techniques ou scientifiques.

Thèmes transversaux

Diagnostic pollinis'Actions, une application pour "évaluer" les jardins
Ressources alimentaires, abris, lieux de nidifications, menaces potentielles, communication... L'application Diagnostic pollinis'Actions vous permet d'évaluer si un jardin répond à ces besoins essentiels des pollinisateurs.

Centres de ressources

Milieux aquatiques continentaux : milieux humides, tourbières, cours d’eau, plans d’eau

  • Le recueil d’expériences sur l’hydromorphologie

    • Recueils d'expériences

    Le recueil d’expériences sur l’hydromorphologie des cours d’eau, destiné aux acteurs de l’eau et partenaires locaux a pour ambition d’inciter à la mise en œuvre de nouvelles actions de restaurations physiques du cours d’eau. Il regroupe sous forme de fiches, des arguments en faveur de la restauration des cours d’eau et présente plus de 120 exemples d’opérations qui ont eu lieu ces 20 dernières années.

  • Restauration des cours d'eau en France : comment les définitions et les pratiques ont-elles évolué dans le temps et dans l'espace, quelles pistes d'action pour le futur ?

    • Comprendre pour agir

    Afin d'améliorer la compréhension du concept de restauration de cours d'eau, de réfléchir à ses apports et ses limites, et d'envisager ses applications futures pour la gestion de l'eau et des milieux aquatiques, un état des lieux des définitions et des pratiques existantes en France et à l'étranger a été réalisé.

  • Guide de préconisations techniques pour l’exploitation alluvionnaire et la réhabilitation hydromorphologique des criques guyanaises

    • Guides et protocoles

    L'orpaillage est une activité induisant de fortes pressions sur les milieux et leur biodiversité, particulièrement riches et fragiles en Guyane. Le présent guide a pour objectif d’appuyer les acteurs de la filière aurifère guyanaise dans la recherche de mesures d'atténuation des risques de pollution pendant le chantier et d'amélioration de la réhabilitation hydromorphologique les sites alluviaux ayant fait l’objet d’une exploitation. Il intéressera ainsi en premier lieu les opérateurs miniers en charge de l'exploitation puis de la réhabilitation.

  • Milieux humides, entre richesse et fragilité

    Tourbières, mares, prés salés, forêts alluviales… sont autant de termes qui illustrent la diversité des zones humides. Elles abritent une biodiversité exceptionnelle et assurent de nombreux et primordiaux services envers la société. Particulièrement menacées, dégradées ou en régression, 87% des zones humides ont disparu depuis le XVIIIe siècle et la moitié entre 1960 et 1990. L'enjeu de préservation est crucial. Améliorer leur connaissance est indispensable.


Centres de ressources

Forêts et milieux boisés

  • Haies et bocages, entre milieux et paysages

    • Agriculture & activités forestières
    • Aménagement & urbanisme

    L’OFB propose aux acteurs et professionnels ces pages synthétiques complétées des ressources plus développées. Elles abordent les haies et le bocage, leur diversité, leur protection, leur entretien, leur création, leur valorisation économique.

  • L’essentiel sur la haie

    • Comprendre pour agir

    Riches de biodiversité autant que de bénéfices pour un territoire et l'agriculture notamment, les haies rendent de nombreux services telle que la protection contre les inondations ou l’érosion des sols. L’Office français de la biodiversité (OFB) propose aux acteurs et professionnels cet ouvrage synthétique rassemblant ses principales recommandations en matière de protection, création, gestion durable, et valorisation des haies.

Espaces agricoles

  • Agriculture et biodiversité, des liens étroits et interdépendants

    • Agriculture & activités forestières
    • Connaissances, données & diagnostics

    L’agriculture est au cœur des enjeux de notre époque : biodiversité, alimentation, changement climatique, ressource en eau, sols, développement économique durable, santé… Si les pratiques agricoles intensives ont un impact certain sur l’environnement, d’autres favorisent la biodiversité et l’utilisent comme une alliée. L’OFB agit avec le monde agricole et ses partenaires en faveur de la transition agroécologique.

  • Les prairies, une question d'équilibre

    • Agriculture & activités forestières
    • Milieux

    Les prairies sont issues d’un équilibre intime entre conditions écologiques et pratiques agricoles et pastorales. Les prairies semi-naturelles ont un fort intérêt patrimonial, environnemental et agricole. L'OFB et ses partenaires se mobilisent pour les préserver.

  • Le sol : une ressource limitée et sous pressions

    Le sol est un réservoir de biodiversité ; il abrite plus du quart de la biodiversité de la planète (FAO, 2021). Le sol rend des services essentiels qui reposent en partie sur sa biodiversité. Mais au même titre que l'eau par exemple, le sol vivant est une ressource qu'il devient urgent de préserver.

  • Haies et bocages, entre milieux et paysages

    • Agriculture & activités forestières
    • Aménagement & urbanisme

    L’OFB propose aux acteurs et professionnels ces pages synthétiques complétées des ressources plus développées. Elles abordent les haies et le bocage, leur diversité, leur protection, leur entretien, leur création, leur valorisation économique.

Centre de ressources : Captages

Milieux urbains

  • Programme de recherche BAUM - Penser la ville aussi pour la biodiversité

    • Rencontres

    Comment penser l’aménagement de la ville, au niveau du bâti et du quartier, pour offrir une meilleure capacité d’accueil à la faune et à la flore ? Les 6 projets de recherche menés entre 2020 et 2024 au sein du programme BAUM (Biodiversité, aménagement urbain et morphologie), expérimentant différentes approches territorialisées, interrogent le rapport entre densification du bâti et préservation de la biodiversité et contribuent à (re)nouer le dialogue entre les mondes des urbanistes et des écologues.

Milieux marins et littoraux

Restauration écologique des habitats benthiques en milieu marin côtier, note technique Life IP Marha, Coll. 2024, OFB, 104 p.
Cette note technique constitue un premier travail de compilation de mesures issues de retours d’expérience de travaux et projets, s’inscrivant dans une perspective de restauration des habitats benthiques. Une méthode d’évaluation élaborée avec PatriNat permet d’objectiver le plus robustement possible les projets présentés.