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Comment améliorer la mise en œuvre de la gestion adaptative en France ?

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Dans le septième numéro de Biodiversité, des clés pour agir, la revue technique de l’Office français de la biodiversité (OFB), Caitlin Grady, Coline Laurent, Mariana Gitz, Martin Bröker de la Clinique de droit « Justice environnementale et transition écologique » et Matthieu Guillemain de l’OFB, donnent des pistes d’amélioration concernant la mise en œuvre de la gestion adaptative en France.

La gestion adaptative, une approche basée sur la science

Introduite en droit français en 2019, la gestion adaptative des espèces « consiste à ajuster régulièrement les prélèvements de plusieurs espèces en fonction de l’état de conservation de leur population et de leur habitat, en s’appuyant sur les connaissances scientifiques relatives à ces populations. » (article L.425-16 du Code de l’environnement)

4 espèces sont aujourd’hui concernées : la tourterelle des bois, le courlis cendré, la barge à queue noire et le grand tétras.

Or, selon les auteurs de cet article, la mise en œuvre de cette approche se révèle difficile, notamment parce que « la définition juridique de la gestion adaptative est plus restreinte que sa définition scientifique » et que « le choix des espèces soumises à la gestion adaptative et des quotas de prélèvements semble cristalliser des postures antagonistes » entre les chasseurs et les associations de protection de la nature.

Des recommandations pour améliorer sa mise en œuvre

Pour identifier des pistes d’amélioration, la Clinique juridique de Sciences Po et l’OFB ont analysé les cadres juridiques français et internationaux de la gestion adaptative et relevé des applications concluantes aux Pays-Bas, en Belgique, en Norvège ou aux Etats-Unis.

Cette analyse leur a permis de formuler 5 recommandations principales :

  • Décentrer la gestion adaptative de la gestion des prélèvements cynégétiques :
    « Adopter une vision plus holistique et multifactorielle de la gestion adaptative permettrait non seulement de réduire les tensions et les difficultés de mise en œuvre, mais également d’élargir son utilisation au-delà des mammifères et des oiseaux, pour la pêche et la cueillette par exemple. »
  • Intégrer la gestion des habitats :
    « La perte et la dégradation des habitats jouent un rôle majeur dans le déclin des espèces au-delà de la chasse, comme chez le courlis cendré affecté par la disparition des zones humides dans lesquelles il se reproduit. Il paraît donc crucial d’intégrer davantage la conservation des habitats des populations soumises à la gestion adaptative »
  • Renforcer la concertation entre les parties prenantes :
    « La concertation est essentielle au processus de gestion adaptative. En s’appuyant explicitement sur cette phase de concertation, ainsi qu’en élargissant la liste des parties réunies, les instances étatiques pourraient élargir les thèmes couverts par la gestion adaptative et considérer un nombre plus vaste de questions émanant de la société »
  • Appliquer la gestion adaptative aussi à des espèces en meilleur état de conservation :
    « Les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de la gestion adaptative sont en grande partie liées au choix des espèces. En considérant aussi des espèces en meilleur état de conservation, les gestionnaires disposeraient de plus de flexibilité quant aux choix de gestion et vis-à-vis d’éventuels quotas. »
  • Améliorer la collecte et la transmission des données :
    « la transmission des données reste un défi. Il est nécessaire de s’assurer que les efforts pour récolter et transmettre les données soient rigoureux et collectifs, afin de diminuer les incertitudes et de mieux informer la prise de décision. »

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L’OFB et la gestion adaptative

La loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 portant création de l'Office français de la biodiversité a conféré à l’établissement des missions « d’expertise et assistance en matière d'évaluation de l'état de la faune sauvage et de gestion adaptative ».

Concrètement, l’OFB fournit des données scientifiques sur les milieux et les espèces qui permettent de déterminer et d’ajuster le nombre maximal de spécimens qu'un chasseur est autorisé à prélever sur une période et un territoire donnés.

En outre, la mesure 3 de la Stratégie nationale biodiversité 2030 vise à faire évoluer les modes de gestion des espèces prélevées en milieu naturel pour éviter la surexploitation. Dans ce cadre, l’Office français de la biodiversité est chargé d’étudier l’extension de la gestion adaptative, notamment à certaines espèces protégées ou susceptibles d’occasionner des dégâts pour mieux prendre en compte les dommages qu’elles occasionnent tout en assurant leur conservation.

Pour améliorer la mise en œuvre de la gestion adaptative, l’établissement travaille actuellement sur une proposition d’une nouvelle gouvernance qui réunirait l’ensemble des parties prenantes. Ce travail fera prochainement l’objet de discussions avec l’ensemble des partenaires et sera présenté au ministère chargé de l’écologie pour validation.

Afin de mener à bien l’ensemble de ces missions, l’équipe chargée de la gestion adaptative au sein de l’OFB est en train de s’étoffer. Un nouvel agent prendra ses fonctions prochainement.