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Castor d’Europe (Castor fiber)
Protégée sur le territoire
Soumise à réglementation
France hexagonale
Le Castor d'Europe est un mammifère semi-aquatique, et l'un des plus grand rongeur de la planète. Cette espèce protégée est une "ingénieure des écosystèmes" au travers des différents aménagements qu'elle réalise dans les cours d'eau.
Taille
Longueur d'1,20 m en moyenne, dont 30 cm pour la partie aplatie de la queue
Poids
21 kg en moyenne – plus gros rongeur d’Europe
Pelage
uniformément brun sur l’ensemble du corps.
Distinction mâle / femelle
aucun dimorphisme sexuel apparent, sauf les mamelles visibles chez la femelle en période d’allaitement.
Le Castor est le plus grand rongeur d'Europe. Il mesure jusqu'à 1,20 m et se caractérise par une queue large et plate. Au début du 20e siècle, il ne restait plus qu'une dizaine d'individus en France. Protégé en 1968 et réintroduit, il recolonise petit à petit le territoire. En 20023, il est présent sur plus de 18 000 km de cours d'eau, notamment sur les bassins de la Loire, du Rhône et du Rhin et de la Moselle. Ce mammifère semi-aquatique vit le long des rivières, des étangs, des canaux. Il se nourrit d'écorces, de feuilles et de tiges qu'il coupe grâce à ses deux paires d'incisives. Cet animal bâtisseur construit des barrages, ce qui lui vaut le surnom d'"ingénieur des écosystèmes".
L'OFB anime le réseau Castor, un groupe de spécialistes qui suit la présence de l'espèce sur tout le territoire. L'OFB apporte aussi des conseils et des solutions pour faire cohabiter le Castor et l'Homme. Un enjeu fort pour la conservation de l'espèce.
Confusions possibles
Ragondin (Myocastor coypus) et Rat musqué (Ondatra ziberthicus)
Castor
Ragondin
Rat musqué
Longueur du corps : 80-100cm Longueur de la queue : 29-31cm Poids : 17 à 31kg
Longueur du corps : 55-63cm Longueur de la queue : 38-41cm Poids : 5 à 10kg
Longueur du corps : 23-32,5cm Longueur de la queue : 29-31cm Poids : 0,6 à 1,5kg
Queue large et plate
Queue à section ronde
Queue à section ovale, légèrement aplatie dorso-ventralement
Palmure complète de la patte postérieure
Palmure incomplète
Aucune palmure
Tête entièrement brune (museau compris)
Museau et moustaches blanches, zone jaunâtre à la base de l’oreille
Partie inférieure de la tête bien plus claire que la partie supérieure
Nage coulée (seuls le haut de la tête et la nuque visibles)
Nage plus en surface (tête entière et dos visibles)
Palmure : membrane de peau reliant les 5 doigts de la patte postérieure du castor (c'est alors une palmure complète). Chez le ragondin, la palmure est incomplète car seuls 4 doigts sont reliés par cette membrane.
Ripisylve en bordure de la Loire (Yoann Bressan, OFB)
Le Castor d’Europe est strictement inféodé aux milieux aquatiques. Il occupe principalement le réseau hydrographique de plaine. Pour s’installer sur un cours d’eau, le castor a besoin d’une présence permanente d’eau, de formations boisées et/ou arbustives rivulaires, d’une pente du cours d’eau et d’une vitesse du courant plutôt faibles.
Castor d'Europe en nage (Philippe Massit, OFB)
Ces critères ne sont pas absolus : lorsque les milieux les plus favorables sont déjà occupés, la colonisation se fait dans des milieux moins optimaux, avec des pentes plus fortes, plus en altitude ou encore sur de très petits cours d’eau (il va alors construire des barrages pour adapter le milieu à ses besoins).
Ainsi, la présence d’ouvrages hydroélectriques infranchissables et incontournables est un obstacle à son installation.
Castor coupant un arbre (Philippe Massit, OFB)
Régime alimentaire : strictement herbivore
Écorce, feuilles et jeunes pousses des plantes ligneuses, plantes hydrophytes, fruits, tubercules, végétation herbacée terrestre (besoin d’environ 2 kg de matière végétale ou 700 g d’écorce par jour).
Une trentaine d’espèces d’arbres peuvent être consommées, essentiellement des salicacées (saules, peupliers). D’autres essences sont localement fortement consommées : cornouiller sanguin, noisetier, orme champêtre.
Les coupes sont concentrées essentiellement sur les troncs et branches de 3 à 8 cm de diamètre (strates arborées rivulaires basses importante), mais sont possibles jusqu’à 80 cm - 1 m de diamètre.
Coupe d’arbre et écorçage (Éric Marboutin, OFB)
Reproduction : espèce monogame (les couples se forment à vie)
Maturité sexuelle : femelles 2 ans / mâles 3 ans
Rut : janvier à mars (accouplement dans l’eau)
Gestation : 107 jours en moyenne
Naissances : mai à juin, 1 portée par an de 2 jeunes en moyenne (jusqu’à 5)
Sevrage : 6 à 8 semaines – Émancipation : au cours du 2ème hiver
Longévité : 10 à 15 ans
Barrage et hutte construits par le Castor d’Europe (Jacques Metral, OFB)
Mode vie : activité essentiellement nocturne et crépusculaire
Le castor vit à l’interface des milieux aquatiques (déplacements, entrée du gîte…) et terrestres (recherche de nourriture, toilettage, marquage du territoire…). Il est plutôt nocturne et passe 2/3 de son temps dans l’eau contre 1/3 sur terre.
Espèce dite « ingénieure des écosystèmes » : modifie son environnement pour l’adapter à ses besoins de façon directe (construction de barrages) et indirecte (éclaircies dans les boisements par ses coupes)
Domaine vital et territorialité : petits groupes familiaux (2 à 6 individus) territoriaux
Site de marquage (borne) à castoréum (Yoann Bressan, OFB)
Les groupes sont formés d’un couple et de leurs jeunes de l’année et ceux de l’année précédente. La population « flottante », composée d’individus isolés, représente environ 40% de la population totale.
Territoire d’une famille ou d’un individu installé : 0,5 à 3 km de cours d’eau en moyenne, selon les caractéristiques du milieu (en particulier la disponibilité de la ressource alimentaire). Marquage olfactif grâce au castoréum, sécrétion à forte odeur de musc produite par une glande anale.
Indices de présence : traces issues de son activité
Gîtes : terriers, terriers huttes, huttes; ils peuvent être établis dans des embâcles, dans des anfractuosités, dans des ouvrages artificiels.
Hutte construite par le Castor d’Europe (Caroline Le Goff, OFB)
Barrages constitués de branchages et parfois de galets ou d’argile permettant l’immersion de l’entrée du gîte et l’extension du domaine vital.
Dépôts de castoréum sur monticules de terres ou sable à moins de 50cm de l’eau.
Coupes d’arbres/arbustes, pour alimentation et matériaux de construction.
Réfectoires ou sites de consommation situés sur des hauts fonds (10 à 20 cm d’eau) et abrités du courant, par des branches entièrement écorcées et reposant sur le fond.
Garde-manger : réserve de nourriture dans un amas de branches immergées à proximité du gîte.
Coulées et accès de berge.
Plus rarement : canaux creusés reliant deux points d’eau.
Empreinte de Castor d’Europe (Paul Hurel, OFB)
Coulée : trace laissée sur le sol par le passage répété d’un ou plusieurs animaux.
Sons / communication
Peu de communication sonore en dehors de gémissements des jeunes au terrier et d’un claquement puissant de la queue à la surface de l’eau en cas de danger.
Répartition du Castor d’Europe (Castor fiber) et du Castor canadien (Castor canadensis) en 2016 (Liste rouge des espèces menacées, UICN version 2018-1)
Mondiale et européenne
Le Castor d’Europe occupait initialement la quasi-totalité de l’Europe et de l’Asie. Ses populations ont commencé à régresser à partir du XIIe siècle jusqu’à sa quasi-disparition au début du XXe siècle du fait des destructions d’individus pour exploiter sa fourrure, sa viande et son castoréum, et car considéré comme nuisible. Il ne restait ainsi à cette époque que 3 noyaux relictuels en Europe de l’Ouest (sur l’Elbe en Allemagne, au sud de la Norvège et dans le delta du Rhône en France, sous-espèce galliae) ainsi que quelques populations isolées en Europe de l’Est et en Russie.
D'après les estimations, il ne subsistait alors dans le monde qu’environ 1200 individus depuis la France jusqu’en Mongolie. La France était l'un des derniers refuges de l’espèce dans le monde.
Les pays scandinaves ont été les premiers à mettre en place des mesures de protection dès les 19e siècle : 1845 en Norvège, 1873 en Suède, 1868 en Finlande. Grâce aux programmes de protection et mesures de gestion, notamment les réintroductions, de différents pays, le Castor d’Europe a recolonisé une grande partie de ses territoires. Sa population mondiale actuelle est estimée à au moins 1,5 millions d’individus.
Le Castor canadien est une espèce exotique en Europe
Il existe également des populations sauvages de Castor canadien (Castor canadensis) en Europe (Finlande, Allemagne) et en Russie, issues d’individus lâchés volontairement ou accidentellement.
La population installée en Finlande est issue d’une introduction volontaire entre 1935 et 1937. Les connaissances scientifiques de l’époque n’avaient encore permis de distinguer les 2 espèces de castors, aussi le gouvernement finlandais avait choisi de réintroduire des castors venant de Norvège et d’Amérique du Nord pour diversifier la population.
La population présente entre l’Allemagne, la Belgique et le Luxembourg, est issue d’individus échappés d’un parc zoologique en Allemagne dans les années 1990.
Ce sont les 2 seules populations encore présentes en nature en Europe.
Répartition du Castor d'Europe sur le réseau hydrgraphique français (réseau Castor, OFB)
France
Après avoir quasiment disparu au début du XXe siècle, le castor a bénéficié de mesures de protection précoces. Ainsi 26 opérations de réintroduction ont eu lieu entre les années 1950 et 2002, faisant appel à des individus issus de la population nationale. Ces actions ont permis à la population d’augmenter à nouveau.
En revanche depuis plusieurs années les populations belges et allemandes à proximité de la frontière française, issues de réintroductions avec des individus originaires d’autres régions européennes, s’étendent en France entre le Grand-Est et les Hauts-de-France.
La France a une responsabilité patrimoniale puisqu’elle est avec l’Allemagne, le seul pays d’Europe de l’Ouest à avoir conservé sa population naturelle de castors, tous les individus étant de la sous-espèce "historique" galliae.
La population de castors d’Europe sur le territoire français métropolitain occupe en 2022 environ 17 000 kilomètres de cours d’eau et est toujours en expansion. Des perspectives de colonisation existent sur la plupart des bassins où l’espèce est présente.
Castor victime d’une collision routière (Michael Jacquier, OFB)
Menaces potentielles sur le Castor d’Europe
Historiquement, le castor a disparu de nombreuses régions de France, du fait de sa destruction par l’humain pour plusieurs raisons. En effet, sa chair, sa fourrure et son castoréum (utilisé en parfumerie et médecine traditionnelle) étaient particulièrement prisés. D’autres part, des primes de destruction étaient versées par des syndicats de digue car il était considéré comme un nuisible.
Aujourd’hui, d’autres types de menaces pèsent sur lui.
Cloisonnement des populations : la présence d'ouvrages hydroélectriques et autres barrages ou seuils infranchissables/incontournables, le développement de l’urbanisation sur les berges, le sectionnement des cours d’eau par des infrastructures routières (écrasement au niveau des passages busés sous chaussées) sont des éléments qui empêchent les échanges d’individus entre les populations. Ce cloisonnement peut être à l’origine d’un appauvrissement génétique (une étude génétique lancée en 2017 apportera des éléments de réponse et d’analyse sur cet aspect, cf. partie Observation, étude et gestion).
Destruction de son habitat, notamment l’endiguement et la canalisation des cours d’eau ou la suppression des ripisylves.
Concurrence du Castor canadien (Castor canadensis) : sur un même territoire, cette espèce exotique semble exclure le Castor d’Europe par compétition. Il est responsable de la quasi-disparition du castor d’Europe en Finlande suite à son introduction en 1937. Sa présence étant confirmée dans des pays limitrophes (Belgique, Luxembourg, Allemagne), son arrivée en France est possible et doit être surveillée.
Lutte contre rongeurs aquatiques indésirables : le castor peut être victime d’erreurs de tir dans le cadre de la lutte contre le ragondin et le rat musqué.
Braconnage : du fait des dommages qu’il cause, le castor peut être victime de propriétaires ou exploitants mécontents.
Captures accidentelles par des engins de pêche comme les nasses à silure.
Développement d’espèces végétales exotiques (ex. : Renouée du Japon) qui peuvent impacter les potentialités alimentaires.
Barrage construit par le castor, induisant une modification des milieux en amont (Paul Hurel, OFB)
Dégâts potentiels causés par le Castor d’Europe
Dommages à l’arboriculture par consommation directe, qui ne font l’objet d’aucune indemnisation. Des mesures de protection efficaces existent, lorsqu’elles sont bien installées : manchons grillagés, palissades en grillage, clôtures électriques…
Inondations dues à la construction de barrages : ce type de dommage est augmentation, notamment du fait de la colonisation des têtes de bassins versants (cours d’eau de petite taille et faible profondeur).
Le Castor d’Europe a été le premier mammifère bénéficiant de mesures de protection (interdictions de destruction) en France en 1909, d’abord localement (Bouches-du-Rhône, Gard, Vaucluse, puis Drôme en 1926).
L’espèce est protégée sur l’ensemble du territoire national depuis 1968.
L’arrêté ministériel du 2 septembre 2016 relatif au contrôle par la chasse des populations de certaines espèces non indigènes, interdit dans son article 4 l’utilisation de pièges de dits « tuants » à 200 m de la rive des cours d’eau, marais, plans d’eau... où la présence du Castor d’Europe (ainsi que de la Loutre d’Europe Lutra lutra) est avérée. La liste de ces secteurs est fixée annuellement par arrêté préfectoral.
Mise en œuvre du protocole de recherche d’indices de présence du Castor d’Europe (Paul Hurel, OFB)
Le réseau Castor suit en continu la répartition géographique
Le réseau est coordonné par l'OFB et missionné par le ministère en charge de l'écologie. Un protocole de prospection est mis en œuvre spécifiquement pour qualifier la présence/absence de l’espèce via la recherche d’indices de présence, et les observations directes d’individus. La carte de répartition est actualisée annuellement, et présente un linéaire de cours d’eau occupé ou non par l’espèce (voir partie précédente).
Étude génétique du castor en France
Depuis 2017 l’OFB et l’université de Liège sont partenaires pour :
Piège à poils mis en place sur une coulée empruntée par le castor (Paul Hurel, OFB)
étudier les caractéristiques génétiques de la population de castors en France,
assurer une surveillance quant à l’arrivée potentielle du Castor canadien.
Entre 2017 et 2022, 227 échantillons récoltés de façon opportuniste (essentiellement sur des cadavres de castor mais également via des pièges à poils) sur l’ensemble du territoire national ont été analysés.
Une surveillance complémentaire est assurée dans la région Grand-Est, où la présence potentielle du Castor canadien est la plus sensible. Ainsi, plus de 200 échantillons ont été récoltés en 2021 grâce à des pièges à poils par un réseau de partenaires.
Résultats actuels (2022)
Aucun Castor canadien n’a été trouvé, seul le Castor d’Europe semble donc présent en France.
La quasi-totalité des individus identifiés appartiennent à la sous-espèce galliae, donc issue du noyau relictuel du bassin du Rhône.
Quelques individus appartiennent à d’autres sous-espèces européennes, tous présents uniquement sur la frange nord-est du pays. Ils proviennent des populations transfrontalières (Allemagne, Belgique, Luxembourg) où des réintroductions ont été menées en mélangeant ces sous-espèces.
Une très faible diversité génétique de la population française de castors.
La diversité génétique à la loupe : une faiblesse historique, un risque à l'étude
L'histoire récente de la présence des castors est faite de « goulots d’étranglements » : quasi disparition au début du XXe siècle avec seulement quelques dizaines d’individus restants, puis recolonisation à partir de ce petit noyau et opérations de réintroduction uniquement avec des individus issus de cette population relictuelle.
Bien que la population ne semble pas souffrir de cette très faible diversité génétique, ce paramètre pourrait constituer une fragilité intrinsèque pour la conservation de l’espèce à long terme, notamment en cas d’évènement externe type épidémie.
Afin de mieux évaluer ce risque, l’étude se poursuit actuellement sur l’analyse plus spécifique de la diversité du système immunitaire. Les résultats permettront d’acquérir des éléments de connaissance sur les capacités d’adaptation de la population.
Programme DAM-IT, les techniques de construction du castor à la loupe
Les barrages de castor modifient les conditions hydromorphologiques locales, induisant parfois des changements importants des habitats et milieux environnants. Des conflits d’usages peuvent apparaître lorsque des éléments anthropiques sont touchés : agriculture, infrastructures, habitations... L’expansion de la population de castors vers les têtes de bassins versants entraîne une augmentation de ces situations parfois difficiles à appréhender.
La recherche de solutions techniques pérennes de cohabitation, compatibles avec les contraintes techniques et réglementaires, a conduit l'OFB et le réseau Castor à monter et piloter le programme d’études DAM-IT, fruit de ce constat et du besoin de compréhension des mécanismes sous-jacents. L'objectif est d'identifier et caractériser les déterminants environnementaux, ainsi que les effets de ces barrages sur l’environnement naturel et anthropique.
Les études, réalisées par l'OFB et ses partenaires, sont structurées autour de 4 grandes questions : où, quels types de barrages, quelles conséquences sur le milieu naturel ou sur les activités humaines ?
Le matériel utilisé, outre la littérature existante, comprend en particulier :
les données récoltées sur le terrain par le réseau Castor : localisation précise et caractéristiques des barrages (dimensions, composition...), paramètres environnementaux locaux...,
les données environnementales disponibles (réseau hydrographique théorique (RHT), cartes d’occupation du sol...).
Où le castor va construire ses barrages ?
Des premiers travaux (2020 et 2021) ont été menés sur l’identification des paramètres environnementaux expliquant la construction de barrages, faisant appel à des modélisations.
Barrage de petite dimension, constitué de tiges de Renouée du Japon (Romain Chazal, OFB)
3 facteurs principaux sont mis en évidence :
la faible section mouillée du cours d’eau (< 10m²),
la faible pente du cours d’eau (< 3%),
la présence de boisements de feuillus.
Les travaux se poursuivent en 2022 grâce à un partenariat de recherche mis en place avec l’Inrae pour développer un modèle prédictif de distribution du castor en France et de présence de barrages.
Quels types de barrages va-t-il construire ?
Selon ses besoins et les conditions environnementales locales, le castor semble construire des barrages présentant des caractéristiques différentes : composition, dimensions, durée de vie... Les effets de ces différents types de barrages sur leur environnement seront aussi variables, et les mesures de gestion des conflits d’usage éventuels devront être adaptées.
Pour essayer d’anticiper ces conséquences, l'objectif est de tenter de dresser une typologie des barrages à partir de données récoltées sur le terrain.
Barrage débordant du lit mineur sur plusieurs dizaines de mètres, constitué de branches et de boue (Caroline Le Goff, OFB)
Barrage de castor de dimension moyenne (dans le lit mineur uniquement) constitué de branches, boue et tiges de maïs (Yoann Bressan, OFB)
Castor consolidant son barrage (Philippe Massit, OFB)
Quelles conséquences auront ces barrages sur le milieu naturel ?
Les modifications induites par les barrages de castors sur les milieux naturels sont largement étudiées dans le monde et globalement reconnues comme positives pour l’environnement. Plus précisément, l’identification et la quantification des effets des barrages sur les différentes composantes des milieux sont essentiels : hydromorphologie et physico-chimie des cours d’eau, habitats naturels, espèces animales et végétales...
Une synthèse bibliographique est attendue fin 2022, afin de constituer un état des lieux des connaissances, et mettre en évidence des besoins éventuels d’études complémentaires à réaliser en France.
Ces résultats seront notamment utiles pour la prise en compte de la présence de barrages de castors et de leurs effets dans les projets de restauration/renaturation de cours d’eau et zones humides. Des réflexions sur ce thème sont en cours avec le réseau de sites de démonstration de restauration hydromorphologique des cours d’eau, piloté par l’OFB.
Zone humide recréee le long d’un cours d’eau en zone agricole, suite à la construction de barrages par des castors (Yoann Bressan,OFB)
Quels effets ces barrages peuvent-ils avoir sur les activités humaines ?
En 2021, une enquête auprès des services départementaux OFB a permis de faire un état des lieux/retour d’expérience sur la gestion des conflits d’usage avec les activités humaines.
70% des conflits sont dus à une inondation directe, et 40% des terrains impactés sont agricoles.
Il est généralement proposé de réduire la hauteur du barrage pour résoudre le conflit (60% des cas), mais la mise en œuvre et/ou l’efficacité des mesures proposées ont été suivies dans moins de 15% des cas.
Il est donc désormais nécessaire :
d’améliorer le suivi des mesures préconisées pour mieux capitaliser les expériences et ainsi essayer de mieux gérer,
d'associer les sciences humaines pour mieux comprendre les paramètres « humains » de ces situations de conflits.
Castor d'Europe (Appareil automatique - 2017 par le SD54-OFB)
Propositions pour la gestion
Agir sur les continuités écologiques pour favoriser la conservation de l'espèce
Favoriser les possibilités de franchissement ou de contournement des ouvrages d’art. Pour les petits ouvrages, installation d’une rampe de franchissement.
Ménager des "corridors verts" le long des cours d’eau en milieu urbain avec plantations de Salicacées, et installation de gîtes artificiels en test.
Aménager et protéger les passages busés où les écrasements sont régulièrement constatés.
Améliorer la qualité de l’habitat pour faciliter la cohabitation avec les activités humaines
Réhabiliter les cours d’eau dégradés et développer une gestion soucieuse des équilibres écologiques prenant en compte la présence du castor dans le cadre des SAGE ou des contrats de rivière : maintien ou restauration des ripisylves en favorisant les salicacées sous forme buissonnante et arbustive.
Dans le cadre du traitement de la végétation des lits mineurs, conserver une bande arbustive d’au moins 5 m de large au contact de l’eau pour préserver les gîtes et les ressources alimentaires. En cas de nécessité, y pratiquer des traitements sélectifs et manuels.
Mise en place et suivi des mesures compensatoires établies par la réglementation en vigueur et par des arrêtés préfectoraux en faveur de la réhabilitation de zones favorables aux castors.
Acquérir les habitats rivulaires les plus intéressants (par les conservatoires régionaux des Espaces naturels ou autres),
Étudier les dommages et les retours d'expériences pour optimiser l'efficacité des actions
Certains actions sont ainsi primordiales à poursuivre :
le suivi des dommages engendrés par les castors, qu'ils soient :
directs : dégâts à l'arboriculture en particulier;
indirects : inondations dues aux barrages;
l'accompagnement à la mise en place de mesures pour limiter ces dommages les plus efficaces possibles.
Cela passe notamment par la valorisation des expériences passées, voire recherche de solutions innovantes et leur expérimentation.
Destruction et manipulations d'individus : réduire les risques
Destructions accidentelles lors d’actions de piégeage ou de destruction des espèces indésirables :
former pour savoir distinguer le castor de ces espèces, notamment pour limiter les erreurs de tirs,
bien connaître l’aire de répartition du castor pour veiller à la bonne application de l’arrêté ministériel du 2 septembre 2016 qui limite l’usage des pièges dits tuants.
Introduction volontaire ou accidentelle dans le milieu naturel de castor canadien : toute manipulation de cette espèce est interdite en France.
Halley D.J., Saveljev A.P., Rosell F.N. (2020). Population and distribution of beavers Castor fiber and Castor canadensis in Eurasia. Mammal Review, 51(1), 1-24.
Ouvrage collectif, Hurel P. coord. (2015). Le Castor et la Loutre sur le bassin de la Loire. Synthèse des connaissances 2014. Réseau Mammifères du bassin de la Loire, ONCFS, Plan Loire Grandeur Nature, 84p.
Dewas M., Herr J., Schley L., Angst C., Manet B., Landry P., Catusse M. (2012). Recovery and status of native and introduced beavers Castor fiber and Castor canadensis in France and neighbouring countries. Mammal Review, 42(2), 144-165.